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Commenceons par là, par se poser la question : "Qu'est-ce qu'une langue ?"

Apprendre à vivre entre les langues ou...apprendre que l'on vit déjà entre les langues ?

Devenir plurilingue ça vous dit ?

Mais, cela veut dire quoi, exactement, "être plurilingue" ?

Donc, vous l'êtes peut-être déjà, plurilingue. Et ce n'est pas étonnant. D'autant plus que les langues, on peut les apprendre tout au long de notre vie ! 

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Et votre pays, est-ce qu'il est (cette fois) multillingue ?

 

Langues officielles, langues régionales, langues vernaculaires, langues véhiculaires... Il y a plein de termes pour parler des langues présentes sur un territoire. Certains parlent de "patois", de "dialectes", tandis que d'autres préfèrent parler de "langues locales", "variétés linguistiques", "régiolectes", "idiomes" etc. Des termes qui véhiculent moins de valeurs culturelles négatives.

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Alors qu'en France nous n'avons qu'une seule langue officielle, des pays peuvent en compter une dizaine. A ceux qui font prévaloire le statut de "langue" pour "les vraies langues, celles qui ne sont pas uniquement parlées, mais qui existent aussi à l'écrit", on peut rétorquer que seulement 200 langues sur les 7100 recensées à ce jour (recensement complexe) existent sous forme écrite.

 

Je me demande : est-il possible d'exclure les locuteurs de 6900 langues de la catégorie de "locuteurs de langues" ? Je me dis que non. En quoi seraient-ils moins en possession de langues mais locuteurs de "simples dialectes" par rapport aux autres ? Transmettre l'idée qu'une langue est "simple et archaïque", et qu'une autre est "complexe et moderne" relève d'idéologies dangereuses pour les cultures dévalorisées et les personnes qui en font parties.

 

Sur quel plan peut-on parler de complexité ? Grammatical ? Richesse et diversité du vocabulaire ? Son enseignement et son apprentissage ?

Et que garantie "la complexité" d'une langue ? Le droit à être placée au-dessus des autres ? Et donc leurs populations et les cultures qu'elles recouvrent, au-dessus des autres aussi ?

Le danger est là.

Un exemple, dire que la langue française est complexe, et argumenter le temps que l'on doit mettre à l'apprendre est un raisonnement erroné. Il est plutôt question d'une méthodologie de l'enseignement complexe. Philippe Blanchet, enseignant-chercheur engagé à Rennes, réputé dans le domaine de la didactique des langues-cultures et du plurilinguisme, fait état du témoignage d'étudiants norvégiens choqués par les méthodes d'enseignement du français en France qui leur paraît trop complexe, car eux n'utilisent que peu le métalangage de la grammaire pour enseigner les langues !

On rajouterait du complexe sous prétexte que la langue française est compliquée à apprendre car "beaucoup plus riche" que d'autres langues.

Alors que c'est notre culture de l'enseignement des langues qui est complexe.

La France compte environ 75 variétés de langues...

En tant que français.e.s, combien de langues sommes-nous capables de comprendre et/ou de parler parmi elles ?

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Moi, une seule. Le français de région parisienne.

En plus de ne pas connaître d'autres langues du territoire si elles m'avaient été transmises (à l'école, à la maison), deux autres langues pourtant représentatives de mes cultures identitaires : l'arabe marocain de la région de Berkane, et l'amazigh du rif, ne m'ont pas non plus été transmises.

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Ceci n'étant pas entièrement imputable aux parents en imaginant qu'ils ne voulaient pas transmettre des cultures d'origine de mon père, mais imputable aussi à une société au système et à l'idéologie monolingues (une langue dominante, une langue officielle, une langue d'enseignement, et l'exclusion des langues locales et d'origines). Cette idéologie, qui dans les années 1980-90, excluaient tout autant les langues originaires de son territoire, que les langues originaires d'autres pays dont les populations immigrées étaient porteuses. Cela aurait été radicalement différent si nous avions grandi dans une société où toutes les cultures sont préservées et protégées, qu'elles viennent d'ici ou d'ailleurs, car, d'ailleurs, nous le sommes tous, et d'ici aussi.

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Aujourd'hui, nous aurions été nombreux à être plurilingues depuis bien longtemps. Et cela aurait changé bien des choses. A commencer par le regard porté sur nos identités propres et sur le Monde. Nous serions certainement un peuple beaucoup moins frileux à l'"étranger", moins frileux d'entendre parler d'autres langues dans son pays, car nous aurions mieux connu notre propre Histoire.

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Diversité des langues de France

 

 

Découvrez toutes les langues parlées en France et en territoires français outre mer. Le français n'est pas la seule langue , loin de là ! https://atlas.limsi.fr/

Ainsi, vous l'aurez compris, il y a une gestion des langues sur le plan politique. Il y a "des aménagements linguistiques" : les langues sont gérées et décidées sur nos territoires (administrations, espaces publics, écoles...) par les politiques.

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Pour se renseigner sur ces aménagements dans le Monde il y a ce site : "L'aménagement linguistique dans le monde"

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Organisations et instituts francophones internationaux (structures culturelles et politiques de coopération) :

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La question finale n'est donc pas "Comment peut-on être plurilingue ?" mais plutôt "Comment peut-on ne pas être plurilingue ?" au regard des diversités culturelles et linguistiques qui nous entourent !

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A chacun d'élargir sa compréhension du monde en apprenant différentes langues étrangères et/ou secondes voire d'origine pour ceux qui en ont été exclus : nationales, régionales, locales...

Peu importe de les maîtriser car il est question d'apprendre sur les autres et/ou sur soi, et leurs et/ou nos cultures plus que de parler "parfaitement". Tout cela dépend de vos objectifs avant tout :)

Ne pas avoir honte, ne pas hésiter à transmettre ses langues d'origines, et les langues apprises aussi, à en parler, c'est croire en la richesse humaine de "la vie entre les langues" et les cultures

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Il est important de vouloir vivre dans des sociétés multilingues où l'on promeut le plurilinguisme, cependant, à des fins humaines, culturelles et non marchandes. L'idée que les cultures soient préservées ainsi que leurs locuteurs protégés relève d'enjeux identitaires, culturels, historiques et civilisationnels forts.

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Si vous vous demandez très justement comme se l'est demandé un ami de mon frère : "Mais c'est quoi la solution du coup? Militer pour la sauvegarde des langues et en apprendre le plus possible?", je vous répondrai que quitter une idéologie pour en rejoindre une autre n'a rien de prometteur et de juste.

Alors comme le disait Schopenhaue, en substance, il convient d'envisager un Monde où nous nous défaisons des idéologies pour se rattacher à des formes de fonctionnement coopératives et pragmatiques.

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Autrement dit, mesurer les besoins et y répondre sans s'embarquer dans de grands discours idéologisant.

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Ainsi, militer pour la sauvegarde des langues oui, car cela répond au besoin de protéger les être-humains de l'extinction de leurs cultures, leurs vies, leurs héritages.

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Apprendre le plus possible ? Est-ce vraiment nécessaire ? Cela dépend de chacun, de ses attraits pour les langues et les cultures, il n'est donc pas question d'imposer un plurilinguisme, en revanche, prendre en considération les individus dont le plurilinguisme fait partie de leur identité, prendre les mesures nécessaires pour faire de nos sociétés le reflet de réalités identitaires et culturelles complexes, cela répondrait à un réel besoin pour les êtres-humains afin que chacun puisse être libre et non persécuté, et bénéficier de libertés fondamentales.

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Je mettrais donc en garde dans ce post sur les langues contre toutes les idéologies, y compris celle du plurilinguisme à valeur marchande, qui ignore d'ailleurs complètement les langues des signes par exemple, ou bien le braille. Sont-elles des langues à part ? Elles sont langues mises à part, et il serait tout aussi important de s'y intéresser et de les inclure.

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A découvrir : L'atlas interactif des langues en danger UNESCO

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Je vous mets un lien vers un documentaire que j'ai diffusé en classe de français au Mexique auprès d'adolescents pour sensibiliser à la question de la transmission des savoirs culturels familiaux, tout particulièrement les langues. Grâce à ce documentaire, on peut voir comment une langue peut disparaître et comment des individus luttent pour la préserver, à leur échelle, et avec leurs moyens. C'est un magnifique documentaire.

 

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Ouvrages :

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Je rajoute des liens vers des associations et des sites qui promeuvent le plurilinguisme et des applis utiles pour acquérir des savoirs en langues et des savoirs culturels :

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Associations :

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Sites :

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Applis :

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Comment parler de sa langue ?

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Bientôt, quelques outils organisant et vulgarisant les savoirs linguistiques pour vous aider à comprendre comment fonctionne votre/vos langues, ce qui la/les compose et ce qui est culturellement intrinsèquement conditionné par elles (rapport au temps, à l'espace, à l'autre...). Ce qui vous aidera à apprendre plus facilement d'autres langues mais aussi à mieux parler de la vôtre aux autres et de donc de parler de vous-mêmes !

 

Car l'un des chocs les plus importants que j'ai eu depuis que je me spécialise dans l'étude des langues, leurs aménagements, les questions d'identités etc. C'est d'avoir réalisé à quel point nous sommes contraints à des formes de pensées sur le Monde par les langues qui nous habitent.

Un exemple, dans les langues respectives (anglais et français) pour un Américain lorsqu'on lui dit "J'avance la réunion de 2 jours" va comprendre qu'il gagne du temps quand un Français va commencer à paniquer et comprendre qu'il a perdu 2 jours (source : Comprendre l'influence de sa culture et de son origine linguistique).

C'est un petit exemple parmi la masse des effets des langues qu'on pratique sur notre quotidien, notre façon de vivre, et nos représentations du Monde.

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Si on veut dire autrement, j'ai pris une claque en me disant : Bahia, tu cherches dans ta vie à être libre, alors que la première des prisons dans laquelle tu as grandi, c'est ta propre langue dont il est impossible de t'en détacher.

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Or, 2ème claque, lorsqu'on apprend d'autres langues, je l'ai senti avec mon expérience mais surtout grâce à la réflexion que je porte sur les langues, on ne fait pas que rajouter des langues à nos connaissances, notre cerveau n'empile pas, il emmêle et réadapte sans cesse son fonctionnement d'appréhension du Monde, et c'est clairement une fenêtre géante vers des libertés fondamentales : celles concernant la construction d'une pensée critique et diverse du Monde.

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On peut commencer par apprendre à quelle famille appartient la langue dont on souhaite parler aux autres :

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familles-lng-map-monde.gif

Allez, le youtubeur de la chaîne Linguisticae nous déblaie tout ça avec humour et enjaillement du public

(oui, l'alcool aidant pour certains ! hahaha) !

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